A
Puerto Aysen, nous sommes allés observer les curieux va-et-vient des bateaux de
pêche dans le port d’Aguas Muertas. Le port n’est pas situé en bord de mer, qui
ne vient plus à Puerto Aysen depuis belle lurette, mais sur un étroit canal :
les bateaux doivent effectuer des manœuvres incroyables pour pouvoir amarrer ou
quitter le port, impressionnant ! Nous avons aussi profité de l’agréable
bibliothèque de la ville pour lire des histoires aux enfants. Et puis les
filles se sont fait couper les cheveux ; en revanche, toujours pas de
barbier pour Julien… Gardera-t-il la barbe jusqu’à Echirolles ou restera-t-elle
chez un barbier de Santiago ? Suspense…
Après
ce paisible séjour à Puerto Aysen, c’est sous la pluie que nous avons rejoint à
vélo l’embarcadère des ferrys de Puerto Chacabuco. L’Evangelistas et son
équipage nous attendaient. Ont embarqué dans le ferry : des dizaines de
camions, des engins de travaux publics, une quarantaine de vaches, quelques
voitures, une vingtaine de passagers et nos 2 vélos !
Le
voyage, bien qu’un peu longuet (30 heures…), fut calme et paisible. Nous avons
alterné moments de repos dans notre cabine, repas, lectures et jeux dans la
salle commune, et observation des paysages et des otaries depuis les différents
ponts du navire. Notre arrivée à Puerto Montt était prévue à 18h, mais nous
sommes finalement arrivés à 22h… Aïe, un peu tard et sombre pour trouver un lieu
pour dormir… Nous avons donc demandé à un responsable de l’Evangelistas si nous
pouvions passer la nuit sur le bateau : pas de problème, il nous a donné
une cabine à l’avant du ferry, avec les autres membres de l’équipage. Super,
merci Navimag ! La nuit fut bonne, mais le réveil matinal : il nous fallut
quitter le paquebot à 5h45, juste avant qu’il ne reparte pour Puerto Aysen.
Nous
avons passé la matinée à Puerto Montt : dans un premier temps en compagnie
des chiens, des agents de nettoyage et des « pilos » du dimanche
matin, puis un peu plus tard, en compagnie des promeneurs, des joggeurs et des
familles. Ensuite l’heure est venue de quitter la ville. On nous avait annoncé
une côte difficile ; oui, oh, des côtes, on en avait vu d’autres depuis le
début de notre voyage, ce n’est pas la petite côte de Puerto Montt qui allait
nous faire peur. Mais lorsque nous avons vu la fameuse « subida »,
nous avons changé d’avis… Mon dieu ce que c’était raide ! Mais comment
est-ce possible de faire des routes aussi pentues ? C’est inhumain (ou
plutôt « incycliste ») !
A
Puerto Varas, au bord du lac, nous avons fait une petite pause « pâtés de
sable » ; Lise et Augustin se sont régalés ! Mais nous, parents,
sommes plus orientés montagne que plage, alors papis-mamies, on compte sur vous
pour emmener les enfants à la mer cet été, ils adorent !! Autour de Puerto
Varas, les campings étaient terriblement chers, impossible pour nous de
dépenser autant d’argent pour une nuit sous la tente. Heureusement, avec un peu
de tact et de négociation, nous avons réussi à diviser les prix par 3. Un peu
plus loin, à Ensenada, les points de vue étaient superbes : volcans aux
formes très géométriques, lac aux eaux translucides, le tout sous le soleil,
merveilleux !
Nous
avons fait un petit crochet par Petrohue, connue pour ses chutes d’eau
spectaculaires, puis nous avons installé le bivouac sur la plage de Petrohue. C’est
en papotant avec le garde-côte que nous avons appris que Petrohue tenait son
nom de la « petro », petite mouche à la piqure douloureuse et
persistante… Ah oui, effectivement : à 19h, nous étions tous les 4
barricadés sous la tente ! Dommage l’endroit était vraiment très joli.
L’étape
du lendemain aura été l’étape du record de rencontres de cyclotouristes :
3 groupes en 2 heures ! Il y a tout d’abord eu Anne-Sophie, lorraine en
vadrouille en vélo couché. Puis ce fut le tour de Christian et Martine, ardéchois
à la retraite ; comble du hasard, ils vivent à 2 pas de chez Yann, celui
qui a fabriqué notre tandem ! Et enfin, nous avons rencontré une famille
de canadiens : Matt (le papa), Amy (la maman), Finlay (5 ans) et Liam (4
ans) ; nous n’allions pas dans la même direction qu’eux, quel dommage, nous
aurions beaucoup aimé partager quelques étapes avec cette sympathique famille…
Pour conclure cette journée riche en rencontres dans la bonne humeur :
baignade pour les 4 bisons dans le lac de Las Cascadas !
Le
lendemain, nous avons voulu quitter la route, pour nous aventurer hors des sentiers
battus, autour du lac de Rupanco. La piste était difficile (sable, gros
cailloux, tôle ondulée) mais le cadre était plaisant : nous roulions en
pleine campagne, au milieu des vaches, des gauchos, des volcans et des
eucalyptus. La fatigue commençant à se faire sentir, nous nous sommes mis à la
recherche « du » camping. Pas une personne ne nous disait la même
chose… 2 kms, 4 kms, 7 kms, 20 kms, faîtes votre choix ! Finalement, une
dame nous a proposé son champ pour quelques pesos, ça nous allait bien. Le
lendemain, nous avons continué de rouler le long du lac. Nous savions que cette
piste était sans issue, mais nous suivions notre instinct : il devait bien
exister un moyen de traverser ce fichu lac ! Nous avons fait la pause
déjeuner près d’un petit ponton en béton, et comme par magie, le Victoria est
apparu. Il s’agissait d’un bateau navette, fonctionnant 3 jours par semaine
uniquement. Décidément, la chance nous poursuivait ! Nous avons discuté
avec Rodolfo, le capitaine du bateau, et d’après lui il existait de l’autre
côté du lac un chemin privé qui pouvait nous permettre de continuer notre
périple. Ni une ni deux, nous avons embarqué ! Nous avons déposé quelques
personnes dans différentes petites criques autour du lac ; seuls des petits
sentiers partaient de ces criques, et à priori des maisons se cachaient dans la
forêt, quelles vies reculées ! Rodolfo nous a laissé au terminus, à la
plage du tigre. Nous avons débarqué tous les 4 avec nos vélos, sur cette plage
déserte, au milieu de nulle part, tel Robinson sur son île. Rodolfo et les 2
membres de l’équipage nous ont fait de grands signes d’au-revoir, Augustin et
Lise étaient comme d’habitude heureux et insouciants, nous aussi, nous ne doutions
pas encore qu’une montée infernale nous attendait… La piste était tellement
raide et caillouteuse que nous devions grimper 2 fois chaque tronçon : une
première fois, Julien se chargeait du vélo de Virginie, Virginie se chargeait d’Augustin ;
une deuxième fois, Virginie et Julien poussaient le tandem et la remorque.
Quant à Lise, elle était autonome : 2 kinder surprises étaient promis en
récompense ! Au bout d’1h30 de cette joyeuse gymnastique, notre bonne
étoile est apparue : Andres et Salvador, surgis de nulle part, nous ont
proposé de monter dans leur 4x4. Pourquoi pas… nous avons accepté. Mon dieu comme
nous avons bien fait ! Nous nous croyions presque arrivés, mais en fait la
piste continuait ainsi pendant 7 ou 8 kms, au milieu d’une forêt dense et
sombre, avec aucune possibilité de bivouac, et aucun passage de voiture.
Nos
2 sauveurs nous ont laissé dans une zone beaucoup plus accueillante, avec des
maisons, des prés, et une belle vue sur le lac. Nous avons demandé à un papi si
nous pouvions planter la tente dans son jardin, au milieu des porcelets, des
oies et des vaches. Aïe, Enrique était sourd comme un pot… la conversation fut
donc difficile, mais les sourires étaient chaleureux, et Enrique finit par nous
ouvrir son portail. Il est resté près de nous pour assister au montage de notre
tente, il n’avait jamais vu ça de sa vie, et ça l’amusait énormément !
Sans
difficulté nous avons rejoint la petite ville d’Entre Lagos. C’était la semaine
du handicap, et nous sommes arrivés juste au moment où une course à pied allait
démarrer. Lise a couru avec fierté les 2 kms du parcours. Quant à Augustin, il
a préféré faire la course sur les genoux de Sandro, un handicapé en fauteuil roulant.
Nous avons tous reçu une médaille, et le maire lors de son discours a
chaleureusement remercié la famille française. C’était un beau moment de joie
et d’émotion, dont nous nous souviendrons longtemps.
Plus
qu’un jour de vélo… Demain nous filons à Osorno prendre un bus pour Santiago.
Il paraît qu’il fait plus de 30°C là-bas, ça va nous changer !